À la demande de la Cour des comptes, les organisations syndicales représentatives ont toutes été reçues en entretien le mardi 11 juillet 2023 après midi. L’entretien a duré environ une heure par visio-conférence.
Ces entretiens s’inscrivent dans le cadre d’une mission globale sur l’AFPA de type audit. La Cour des comptes s’est également entretenue avec du personnel de l’AFPA (directeurs régionaux, directeurs de centres, responsables de formation, de l’accompagnement, salariés et stagiaires…).
La Cour des comptes a souhaité engager une « discussion libre » autour des effets du plan de transformation et de l’avenir de l’AFPA en revenant sur la période de 2018 à aujourd’hui et ce, du point de vue des organisations syndicales.
Les auditeurs et auditrices de la Cour des comptes nous ont précisé que le rapport serait publié fin décembre 2023 / début janvier 2024.
Nos constats/Nos inquiétudes
Nous sommes intervenus sur la stabilité de l’AFPA, qu’elle soit économique ou sociale. Le plan de transformation et de suppressions d’emplois (dans le cadre d’un PSE définitivement non homologué par une décision du Conseil d’Etat) qui aurait dû permettre à l’AFPA de renouer avec l’équilibre économique, comme cela avait d’ailleurs été inscrit dans le premier COP (Contrat d’Objectifs et de Performance) de l’Agence pour la période 2020 – 2023, n’a pas eu les résultats attendus.
Force est de constater que nous en sommes loin ! Il a en revanche affaibli la capacité de l’AFPA à répondre aux besoins nationaux en termes de formation professionnelle qualifiante. Dans ce cadre, nous avons pris l’exemple des « villages des solutions », un « produit phare » de l’AFPA, dont nous avons du mal à mesurer la plus-value, faute de retour d’expérience factuel des premiers villages. Ce qui est certain, c’est que sans formations qualifiantes dans les centres, le village se résumerait à un « passe-plat »…
Nous avons souligné que la situation compliquée qui perdure à l’AFPA depuis de nombreuses années se répercute, malgré l’engagement des salariés, sur la qualité attendue de ses activités qui n’est plus toujours au rendez-vous, et sur les conditions de travail.
Cependant, face à ces différents constats, nous estimons que des solutions existent pour que l’AFPA soit renforcée, au sein d’un Service Public de l’Emploi mieux articulé et coordonné, comme un acteur majeur d’un Service Public de la Formation Professionnelle regroupant d’autres acteurs comme le CNAM et les GRETA.
Nous avons insisté sur la complémentarité de nos missions plutôt que sur la concurrence avec les autres acteurs de la formation.
Notre force
Nous sommes convaincus qu’il est possible de sortir de ces difficultés persistantes. La formation professionnelle continue est une des clés de voûte pour réussir les transformations majeures dans notre société.
Par exemple, la CGT AFPA est convaincue que la crise écologique globale que nous traversons doit être l’occasion de transformer en profondeur notre modèle économique et social. Nous sommes persuadés qu’un établissement public tel que le nôtre peut et doit contribuer à relever les défis de cette crise écologique, grâce à sa capacité à accompagner les mutations du travail et des métiers sur le territoire.
C’est d’ailleurs ce qu’elle a toujours fait depuis sa création. La genèse de l’AFPA en atteste : dans des périodes de transition et de rupture (Libération, choc pétrolier des années 1970 ou crise économique et financière de 2008), investir dans la formation des citoyens et des citoyennes est un acte déterminant et un devoir d’État.
L’AFPA contribue déjà à la politique de certification au travers de ses missions nationales de service public (MNSP), et grâce à son ingénierie. Il nous paraît nécessaire de renforcer ses missions afin de répondre aux besoins de qualification de la population.
Nous croyons que le développement de l’activité de formation qualifiante et de son accompagnement passent par l’arrêt de la précarité de l’emploi et le renforcement de ses effectifs.
Nos propositions de développement de l’AFPA
Pour résoudre durablement les problèmes structurels de l’AFPA en développant son activité, la CGT AFPA a partagé avec la Cour des comptes quelques exemples de ses propositions (que vous retrouverez de manière exhaustives sur notre site) :
- Augmenter les subventions versées à l’AFPA pour ses missions nationales de service public, passer de 110 M€ à 250 M€, ce qui revient à sanctuariser les versements « exceptionnels » devenus récurrents, en contrepartie de nouveaux programmes nationaux.
- Les métiers d’avenir, rares et émergents, nécessitent une ingénierie et une prospective dédiés. L’AFPA a déjà la capacité d’expérimenter grâce à des incubateurs, mais l’innovation ne peut s’accélérer et se structurer qu’avec des moyens supplémentaires. Cette ingénierie peut s’appuyer sur les compétences de l’AFPA et devrait faire l’objet de financements renforcés dans le cadre des Missions Nationales de Service Public.
- Pérenniser les programmes Promo 16-18 et Prépa compétences, et CDIser les salariés précaires qui contribuent à la réussite de ces dispositifs.
- Mettre en place un plan d’investissements pluriannuels permettant de rénover et d’isoler les bâtiments, rénover les hébergements, investir dans de nouveaux plateaux techniques de formation pour continuer à être à la pointe.
- Mettre un terme à la précarité galopante par un plan ambitieux d’intégration des précaires.
- Lutter contre la fracture climatique et le climato-scepticisme, les publics les plus éloignés de l’emploi ne doivent pas être exclus. L’AFPA peut y contribuer en formant tous les stagiaires qu’elle reçoit chaque année (développement d’un module obligatoire).
- Mettre en place de nouveaux droits pour se former et se reconvertir. La disparition du CIF a laissé un grand vide, et son remplacement par le CPF de transition n’est pas à la hauteur. Il faut favoriser les reconversions volontaires et non subies, qui répondent aux aspirations des travailleurs.
- Mettre en place les conditions d’une coopération entre les membres du SPE et les acteurs publics de la formation professionnelle, pour sortir de la concurrence délétère qui sévit aujourd’hui sans que leur efficacité ou la qualité du service rendu ne soit améliorée. Pour la CGT, la création d’un service public de la formation professionnelle regroupant AFPA, CNAM et GRETA aurait bien plus de sens et de portée.
Comment allons-nous travailler demain ?
Quels sont les emplois qui vont disparaître ?
Quels nouveaux métiers vont émerger ?
Dans quels territoires ?
Comment accompagner les reconversions professionnelles ?
Comment former les professionnels aux nouvelles compétences ? …
Autant de questions auxquelles l’AFPA peut apporter sa contribution.
La CGT AFPA y croit, pourquoi pas l’Etat ?
Montreuil, le 18 juillet 2023