Négociation sur la déprécarisation des emplois au sein de l’Afpa

Cette première réunion du 4 février 2021 était consacrée à l’analyse des documents remis par la direction et à l’expression des revendications des OS sur le sujet de la déprécarisation à l’Afpa. Cette négociation se déroulera jusqu’à fin octobre 2021 (6 séances).

Il est indiqué dans l’accord de séquencement des négociations que : « L’AFPA s’engage à limiter le recours aux CDD et autres emplois précaires. À l’exception du remplacement de salariés absents, le recrutement se fera prioritairement sous forme de CDI. Ainsi le recours au CDD temporaire sera possible à condition que l’activité soit liée à une commande exceptionnelle, n’excédant pas la durée d’un CDD renouvellement compris. »

Il s’agit donc de rendre effectif cet engagement à limiter le recours aux emplois précaires, en supprimant le recours aux contrats « abusifs », en permettant à un plus grand nombre de précaires d’accéder à un CDI à l’AFPA et en gagnant de nouveaux droits. Pour autant, le premier volet consacré à la déprécarisation à court-terme dans le cadre du PSE s’est terminé fin octobre 2020, mais la direction n’a pas donné de bilan à la CNES comme elle s’y était engagée et considère que ce volet est clos…

La CGT rappelle que le CDI doit être la règle et que le recours aux précaires, qu’ils soient CDD, intérimaires, autoentrepreneurs voire sous-traitants, doit rester l’exception. Une évidence pour certains, mais qui est loin d’être le cas à l’Afpa, comme on peut le voir dans l’analyse que nous avons réalisée à partir des données de la direction et de l’expert du CSEC.


Analyse quantitative de la précarité à l’AFPA

précaires

Les chiffres transmis par la direction confirment que le nombre de précaires à l’Afpa ne baisse pas, bien au contraire. En effet, nous constatons que de 2013 à 2019 les CDI ont baissé de 28 % (soit – 2155 ETP hors PSE) et que sur la même période, les CDD ont augmenté de 60 % (+ 476 ETP). En 2020, la précarité a poursuivi son ascension pour atteindre des sommets jamais connus à l’Afpa : plus d’un salarié sur 4 est en situation de précarité !

Le taux de précarité (CDD + intérim/effectif total) s’élève à 26 % en 2020. Sans compter les autoentrepreneurs, les cabinets de « management de transition », les contrats de jurys et surveillants d’examen, et autres prestataires… et ce sans tenir compte des recrutements prévus pour la Promo 16 18 (50 % CDI et 50 % CDD) pour lesquels nous n’avons pas d’information précise. Compte tenu de ces éléments, le taux de précaires pourrait être encore bien supérieur en 2021.

Taux

À titre indicatif, en France en 2018, « 84,7 % des contrats étaient à durée indéterminée (CDI) ou fonctionnaires, 10,5 % en contrat à durée déterminée (CDD), 3 % en intérim et 1,8 % en apprentissage ». A l’Afpa nous sommes bien au-delà de ces moyennes, une situation qui s’est fortement dégradée ces dernières années et qui interroge dans un établissement public tel que le nôtre, où de plus en plus de précaires forment et accompagnent d’autres précaires ! Une situation d’autant plus inacceptable que nous sortons d’un plan de licenciements d’ampleur, qui n’a pas résolu les problèmes de précarité, mais les a plutôt amplifiés !

En l’absence de budget prévisionnel 2021, qui n’est toujours pas validé par les tutelles, nous n’avons pas d’indications sur les effectifs prévus, ce qui permettrait de mesurer l’engagement de déprécarisation. Pour rappel, dans la Loi de Finances 2021, il est demandé un nouvel effort de réduction des effectifs à l’AFPA de 316 ETPT !

D’autre part, nous constatons qu’il y a une grande disparité entre les régions : 1 % à la DIFQ, 4 % Siège, 51 % en Corse, en passant par 34 % en HDF et 13 % en PACA. Comment la direction explique-t-elle ces écarts ? Sont-ils liés à des gestions différentes des effectifs par les DR ?

Disparité également entre les catégories d’emploi : les plus précarisés sont les personnels de la formation (36 %) et de l’accompagnement (35 %) alors qu’il s’agit de notre cœur de métier, et paradoxalement ceux qui bénéficient le moins d’une intégration en CDI !

Nous n’avons pas pu analyser la répartition des CDD et intérimaires par motifs (contrats de remplacement ou d’accroissement temporaire d’activité), les documents transmis étant incomplets. Là aussi, il est nécessaire d’avoir une vision claire pour avancer. Nous avons demandé à la direction une analyse plus précise des emplois les plus précarisés, afin de pouvoir mettre en œuvre des mesures correctives adaptées. Quant aux perspectives d’intégration à l’AFPA, elles sont bien maigres : en 2020, moins d’un CDD sur 8 a été intégré en CDI (505 au total sur les 3802 CDD, soit 13 %). En termes de déprécarisation, il y a du pain sur la planche !

Au-delà des chiffres, des situations concrètes :

Les chiffres de la direction confirment ce que nous avons constaté sur le terrain : les CDD sont d’office embauchés en classe 9 pour les formateurs, et en classe minimum pour les autres salariés (conseillers en transition ou personnel d’appui), alors que l’Afpa a déjà été condamnée pour ces faits.

On observe aussi des successions de CDD, puis des contrats intérimaires et autoentrepreneurs pour le même salarié, afin d’éviter les périodes de carence : une pratique pourtant illégale ! Des CDI en lettres de mission, remplacés par des CDD : une pratique Afpaïenne bien connue, qui consiste à « détacher » un salarié de son poste via une lettre de mission (ou pas d’ailleurs…) et de le remplacer par un CDD. Par exemple, un formateur en logistique est détaché sur un emploi de coordinateur (qui n’existe pas), sans appel à candidatures. Son travail : faire les plannings des formateurs (une activité qui relève de la responsabilité du MF). Ce qui génère souvent des heurts entre le coordinateur (sans pouvoir hiérarchique) et ses anciens collègues formateurs qui voient d’un mauvais œil cet ex-collègue leur dire quoi faire et quand. Un coordinateur remplacé par un CDD, lui-même ex-stagiaire Afpa, à peine sorti de formation…

Parfois, les directions utilisent les contrats de jurys ou surveillants d’examens pour remplacer des formateurs… Ni vu ni connu, ces contrats fantômes n’émargent pas sur le quota de CDD. Et bien entendu, n’oublions pas les collègues qui interviennent depuis plusieurs années à l’Afpa, qui sont devenus « pérennes » dans leur activité, mais que la direction maintient dans la précarité.


Nos premières revendications

1. Un CDI pour tous

Stop aux CDD à répétition ! Jouant sur les motifs de remplacement, les intitulés de postes ou les lieux d’exercice, le chapelet de CDD devient parfois si lourd à porter que le sentiment d’être abusé pousse de nombreux collègues à quitter l’AFPA. Lassés des promesses jamais tenues, ils partent fréquemment à la concurrence offrir les compétences pédagogiques acquises et parfois, les contenus pédagogiques. L’encadrement s’épuise dans la recherche incessante des compétences indispensables à la réalisation des missions.

Nous demandons à la direction des objectifs clairs et chiffrés de déprécarisation, au-delà des déclarations d’intention.

2. Pas de différence de traitement CDI / CDD

La CGT est opposée à toute différence de traitement des salariés. Cette négociation ne doit pas aboutir à des règles différentes pour les CDD et les CDI. En effet, la direction met en avant des contreparties pour le recrutement des CDD : polyvalence, mobilité, potentiel pour mieux intégrer de nouveaux modèles pédagogiques et les outils digitaux. De quelle polyvalence s’agit-il ? Et de quelle mobilité parle-t-on ?

Pour la CGT, la polyvalence ne doit pas être une condition à la CDIsation et la mobilité doit reposer sur le principe du volontariat. Quant à la maîtrise des outils numériques, ils concernent tous les salariés, quels que soient leurs statuts, et il revient à la direction d’organiser leur formation.

3. L’accompagnement des CDD vers la CDIsation en leur permettant d’acquérir toutes les compétences exigées pour le poste

Les formateurs sont catapultés du jour au lendemain en situation de formation ; les professionnels de l’accompagnement ou du recrutement, avec toute leur bonne volonté, doivent « se débrouiller » et compter sur les collègues pour espérer un conseil, une ressource à jour et adaptée, un code pour les applicatifs. Quel que soit le métier, les salariés précaires doivent pouvoir bénéficier d’une période d’intégration avant le démarrage de l’activité (par ex. 1 semaine, à moduler en fonction du poste et de l’expérience à l’Afpa).

Dans l’objectif d’une CDIsation, les salariés précaires doivent passer par les mêmes étapes de recrutement que les CDI et bénéficier d’un accompagnement, notamment par la formation, pour leur permettre d’acquérir les compétences nécessaires avec tous les moyens adaptés pour réussir les essais professionnels.

Pour les CDD qui ne pourraient pas être CDIsés, un accompagnement doit également être mis en place : délai de prévenance avant la fin du contrat (pour éviter que les salariés n’apprennent le vendredi matin que leur contrat n’est pas renouvelé !), autorisations d’absence pour recherche emploi, voire mise en place d’un réseau avec les partenaires de l’Afpa. La déprécarisation ne doit pas se limiter à l’interne de l’Afpa.

4. L’élargissement du dispositif itinérant à d’autres métiers (administratifs, encadrement…)

Le dispositif itinérant peut devenir un levier pertinent pour la déprécarisation. Quitte à favoriser les mobilités pour celles et ceux qui le souhaitent, autant développer ce dispositif et l’ouvrir à d’autres métiers. La polyvalence choisie, accompagnée et sécurisée, sera le meilleur atout pour faire face aux enjeux de demain, tout en permettant de s’enrichir professionnellement. D’ailleurs on constate que des personnels d’appui sont amenés à faire de l’itinérance « masquée » sans pouvoir prétendre à l’accord spécifique pour les itinérants. Dans le passé, des CDRF et des CDRG y étaient intégrés pour effectuer les remplacements de courte et moyenne durée. Il faut redonner au dispositif itinérant son objectif premier : remplacer les salariés absents.

La CGT propose donc de l’ouvrir à d’autres métiers, pour enrichir le système et ainsi réduire le recours aux contrats précaires.

Par ailleurs, les CDD en fin de contrat pourraient intégrer le dispositif, sur la base du volontariat, pour éviter la fuite des compétences, dans l’attente de l’ouverture d’un poste en CDI dans la région souhaitée.

5. L’abandon de l’externalisation de nos outils, nos services et de nos savoir-faire (restaurations, hébergement, systèmes d’information, …) et la réduction de la sous-traitance

parce que les sous-traitants, soumis à des logiques d’appels d’offres, aboutissent à une réduction des coûts en soumettent leurs salariés à une grande précarité.

A la CGT, nous considérons que les services associés au sens large doivent rester intégrés à l’AFPA.

6. La prise en compte de l’égalité femmes hommes dans la déprécarisation

Parce que l’on sait que la précarité touche de nombreuses femmes, accentuée par le temps partiel imposé, des mesures spécifiques doivent être mises en place.

Nous avons demandé à la direction que les informations transmises le soient par genre.

7. Déprécarisation et conditions de travail

20 % de la précarité est liée à des remplacements de salariés en maladie. Il faut donc agir sur deux leviers complémentaires :

Investir sur la prévention pour améliorer les conditions de travail, ce qui fera baisser la précarité tout en réalisant des économies par un « retour sur les investissements liés à la santé ».

Remplacer systématiquement les salariés absents afin d’éviter le report de la charge de travail sur les autres collègues.

Pour la CGT, les précaires doivent être accompagnés tout au long de leur présence par leur hiérarchique afin de s’assurer qu’ils disposent de tous les moyens nécessaires pour assurer un travail de qualité et ce dès les premiers jours du contrat. Que de temps et d’énergies perdus, ne serait-ce que pour obtenir son code agent !


La prochaine réunion est prévue le 15 avril. Si vous avez des suggestions et/ou remarques, n’hésitez pas à en faire part à vos représentants syndicaux CGT ou à l’adresse mail cgtafpa.national@gmail.com

Montreuil, le 8 février 2021