Rapport du médiateur de l’année 2021
Déclaration CGT CSEC du 12 avril 2023

Pour la délégation CGT, le rapport du médiateur 2021 présenté de manière assez succincte, voire trop rapide en CA en septembre 2022, souligne que les litiges liés à la dégradation de la qualité des formations sont de nouveau en tête (recours accru aux emplois précaires, CDD, intérimaires et sous-traitants).

Pour le médiateur, « la baisse sensible des saisines constatée sur le thème « la qualité ressentie du formateur, son professionnalisme » (pour la première fois depuis 3 ans) est la conséquence du déploiement des dispositifs de recrutement et d’accompagnement des formateurs. »

Pour la CGT, il faudra toutefois vérifier que cette tendance se confirme bien en 2022 et dans les années suivantes. Par ailleurs, le parcours « start formateur» n’est pas encore systématique pour tous les nouveaux embauchés et n’est pas toujours suffisant.

On peut noter que le dispositif itinérant est reconnu pour la qualité des interventions en réponse aux absences ponctuelles et imprévues. C’est en effet la garantie de disposer de formateurs expérimentés et capables de s’adapter à de nombreuses situations. Le problème actuel réside dans son sous-dimensionnement par rapport aux besoins.

À la CGT, nous sommes convaincus de la nécessité du développement des itinérants, un investissement qui permettrait de réduire ces problèmes de qualité des formations et des critiques négatives sur l’Afpa.

Page 44 du rapport : on constate 86 saisines en 2021 sur la question de la discrimination, en hausse de 7 % par rapport à 2020 avec en tête la question égalité Femme/Homme (F/H).

Ces saisines pour discrimination, en forte progression, doivent amener la direction à mettre en place des formations obligatoires pour le personnel et les stagiaires et pas qu’une simple campagne de sensibilisation. Par ailleurs, la CGT est toujours en demande d’une négociation sur le thème de la diversité, demande effectuée en réunion de négo F/H, mais non présente dans l’agenda social de la direction pour le premier semestre 2023, ni le second… Nous développerons et compléterons ce sujet et notre point de vue dans un second temps.

Autres chiffres et deuxième cause de recours avec une augmentation sensible cette année : les saisines sur des contestations de sanctions disciplinaires +24%. Le Vade-mecum autour des sanctions étant déjà une recommandation depuis 3 années consécutives, la CGT amène une vigilance sur ce point et rappelle que la sanction n’est pas forcément la réponse idéale dans l’accompagnement d’une personne et demande que toutes les autres solutions soient épuisées avant.

Notre délégation souligne la préconisation du médiateur de s’appuyer sur la RSE sur plusieurs chantiers, cette prise en compte semble positive et dans la lignée de nos positions dans les différentes instances. Nous attendons de voir comment la RSE, dans le cadre du développement durable, sera intégrée systématiquement dans les modules de formation que ce soit à l’attention des formateurs, mais aussi des stagiaires.

Pour la CGT, il faudrait que tous les salariés soient formés à la RSE et le développement durable (avec des formations plus spécifiques pour certains métiers) et que cela ne repose pas sur les seul·es formateur·trices.

Mais revenons un peu plus dans le détail sur le chapitre diversité/discrimination :

Depuis 2019, le sujet des discriminations a nettement émergé et s’est confirmé en 2020 et plus encore en 2021, puisqu’il devient le premier motif de saisine.

Suite aux phénomènes #MeToo, affaire Weinstein, BalanceTonPorc ou plus largement la montée du féminisme et des collectifs de défense des violences faites aux femmes, la parole s’est progressivement libérée dans la société, et donc aussi à l’AFPA.

Pour autant, la parole libérée n’a pas encore trouvé d’écoute par des personnes formées, bienveillantes et surtout lucides sur les racines de ces maux que sont les stéréotypes et les préjugés.
En effet, aborder le sujet de la « non-discrimination » ou de la « diversité », c’est parler de l’objectif sans traiter des comportements qui en sont à l’origine.
Ainsi, pour espérer une baisse statistique de ces manifestations, il faudra concentrer les actions sur ce qui permet de modifier des comportements individuels et collectifs. Pour autant, ceux-ci sont ancrés très profondément dans la société, car les stéréotypes et les préjugés sont d’ordres culturels, automatiques et inconscients.
Dès lors, ces modifications suscitent des réticences, voire des résistances (perte de repères éducatifs, religieux, sociétaux, identitaires…). Ne plus avoir de propos sexistes génère des défenses types : « on ne peut plus rien dire, on ne peut plus rire ». La relation à l’autre est ainsi perçue comme bridée, entravée d’un mode de communication devenu au fil des années (pour ne pas dire des siècles) habituel, consensuel, automatique.

Autrement dit, pour traiter les discriminations, il faut :

  • Aborder les mécanismes qui aboutissent à ces comportements (stéréotypes/préjugés).
  • Comprendre leurs origines et leurs impacts.
  • Traiter le sujet de manière non culpabilisante.
  • Conformément à la loi, mettre à jour le règlement intérieur pour ancrer l’interdiction et l’information sur les sanctions qui en découlent, notamment du fait de l’évolution récente des lois en la matière (exemple : loi santé août 2021).
  • Renforcer la formation des référents harcèlement et agissements sexistes et leur donner les moyens d’agir sur le terrain (temps de délégation, déplacements régionaux pris en charge…).
  • Clarifier leur rôle et surtout leur participation à l’étude de la caractérisation du signalement qui pour l’instant reste du seul fait de la direction, comme pour les fiches alertes RPS.
  • Former tous les managers et directeurs, spécifiquement, sur des formations suffisantes et non des modules de 2 h en e-learning.
  • Les employé·e·s chargés des missions de recrutement doivent recevoir une formation à la non-discrimination à l’embauche au moins une fois tous les cinq ans. C’est à l’employeur qu’il revient de mettre en œuvre cette obligation (article L. 1131-2 du Code du travail).

Notre Critique sur le chapitre, page 44 du rapport :

« En affinant ces données, on constate que les 86 saisines du dernier exercice portent d’abord sur la question d’égalité Femme/ Homme (33)… Il est, dans ce domaine, parfois difficile de faire la part des choses entre ce qui est de l’ordre du ressenti et ce qui constitue une discrimination avérée.

  • Un peu comme les RPS donc … subjectivité et pluralité des causes … mais en l’absence TOTALE d’enquête contradictoire, pour justement caractériser les faits, on reste dans le flou ou sur la seule appréciation qu’en porte la direction (exemple en PACA d’une situation qui mélangeait racisme et sexisme, mais sans aucune enquête ; clôturée par une non-reconduction du formateur en CDD…)

« L’ensemble des salarié·e·s de l’Afpa, et en particulier, ceux qui sont au contact des stagiaires, doivent être sensibilisés, informé·es·s et conscient·e·s des évolutions du droit de plus en plus sévère face à ces dérives,
mais aussi des évolutions sociétales et du fait que le niveau d’acceptabilité face aux discriminations ne cesse de se réduire ».

  • La formulation est plus que maladroite. La discrimination liée au genre ou autre n’est pas une « dérive », mais une interdiction posée dans la loi depuis 2008 notamment. De plus, il ne nous faudrait pas sous-entendre que l’évolution de la loi est une menace dont il faut prendre conscience, mais un garde-fou pour stopper ce qui n’est pas acceptable. C’est aussi une manière de se placer du côté des « agresseurs » et non des victimes…

« Les sujets de discrimination, et parfois de harcèlement qui peut en découler, sont également pointés entre stagiaires (près d’un tiers des dossiers comme l’année passée) et réclament à ce titre une attention particulière des équipes pédagogiques. »

  • Une attention particulière n’engage pas beaucoup la direction et renvoie la balle au collectif sans lui donner les moyens… nous pourrions proposer des échanges de pratiques sur ce thème, un soutien psychopédagogique comme c’était le cas « avant »

Mélanger le respect d’autrui, le vivre ensemble, avec les enjeux environnementaux, est une pirouette bien pratique pour légitimer à postériori la stratégie RSE de l’AFPA. On mélange tout pour faire un joli panier garni. La manipulation induite pour faire avaler la volonté d’aller sur du RSE est franchement maladroite. Pourquoi ne pas plutôt évoquer l’ambition affichée en négo EPFH d’aller vers le label ALLIANCE (diversité et égalité) ?? Ce serait bien plus adapté !

Enfin la volonté de former les formateurs·trices, évidemment utiles, n’emporte pas l’importance de former AUSSI la ligne accompagnement, qui pourtant gère aussi du groupe et/ou de l’individuel. Cela reste malheureusement cohérent avec ce qui est pour l’instant avancé dans le projet EPFH qui parle uniquement de former les formateurs (et le management, le recrutement), mais pas l’accompagnement, ce que la CGT va continuer de revendiquer en négo EPFH.

Pour conclure, il nous reste des questions sans réponses sur ce rapport du médiateur 2021 :

  • Qu’est-ce qui explique les différences de pourcentage de traitement des saisines (de 55 % en Pays de la Loire à 100 % en PACA) ?
  • Qui décide du traitement ou de l’abandon d’une saisine ?
  • Quid des recommandations du médiateur : poursuivre l’amélioration du recrutement des formateurs en CDD ; Traiter les réclamations de groupe avec la plus grande attention.
  • Créer un vade-mecum pratique des sanctions disciplinaires à l’usage des managers (une recommandation formulée depuis 3 ans n’a pas encore été engagée), pourquoi, quels sont les freins/blocage pour ne pas pouvoir engager ce chantier ?
  • Former les correspondant·es régionaux·ales de la médiation (une recommandation formulée dans le précédent rapport n’a pu être mise en place à cause de la pandémie de Covid et doit être reprogrammée) d’après le CA de septembre, les acteurs ont débuté leur formation fin septembre début octobre 2022, pouvez-vous nous confirmer que cette recommandation a abouti dans sa globalité ?
  • Existe-t-il un lien entre les deux pôles médiations de l’Afpa : salariés/stagiaires dans la résolution du conflit : par exemple : dans un litige entre un formateur et un stagiaire et avant d’en arriver à une situation difficile pouvant aller parfois par une exclusion d’un.e stagiaire ou un licenciement d’un.e salarié·e ?
  • Renforcement de l’information des usagers de l’Afpa sur leurs droits (et devoirs), en particulier pour les premiers niveaux de qualification. Avez-vous un calendrier de mise en place de ces révisions ?
  • Systémisation d’un module RSE destiné aux stagiaires et porté par leurs formateurs (responsabilité environnementale / citoyenneté / vivre ensemble / non-discrimination…) Peut-on penser qu’un module (ou plusieurs) spécifique pourrait être systématiquement intégré à toutes les formations qualifiantes ?
  • Au niveau du parcours « Talent formateur », peut-on connaître le délai maxi du lancement du processus par rapport à la date d’entrée dans l’entreprise de la formatrice ou du formateur ?

Enfin et pour conclure, il aurait été intéressant d’obtenir une synthèse ou bien un projet du rapport médiateur 2022 dans le premier semestre de cette année et non fin 2023…

CGT AFPA, le 12 avril 2023